« La loi est mal faite »: maltraités, ces enfants refusent d’aider

D’anciens enfants maltraités veulent faire évoluer la loi qui les oblige, dans certains cas, à subvenir aux besoins de leurs parents violents. Le sénateur Renaissance Xavier Iacovelli s’est emparé du sujet et entend déposer un texte au Sénat dans les prochains mois.

Aider financièrement sa mère pendant ses vieux jours? Pour Tom Franzo, c’est « hors de question ». Le jeune homme de 19 ans affirme avoir été victime de violences psychologiques de la part de sa génitrice pendant toute son enfance.

« Le conflit était permanent. Elle ne savait pas parler, elle criait. J’étais collégien en internat. Quand je revenais que le week-end à la maison, ces moments-là étaient invivables », explique-t-il au micro de BFMTV.

Pourtant, « si elle a besoin d’aller à l’Ehpad, si elle est en manque d’argent, il va falloir que je subvienne à ses besoins », regrette-t-il. « La loi est mal faite ».

Des exceptions limitées

L’article 205 du Code civil, rédigé en 1803 mais toujours en vigueur, indique en effet que « les enfants doivent des aliments à leurs père et mère ou autres ascendants qui sont dans le besoin ». Une obligation qui s’applique d’ailleurs « aux gendres et belles-filles envers leurs beaux-parents », selon l’article 206. Ne pas se soumettre à cette loi revient à commettre un abandon familial, qui peut entraîner une peine allant jusqu’à deux ans d’emprisonnement et de 15.000 euros d’amende.

Heureusement, des exceptions à cette « obligation alimentaire » existent. « L’enfant dont le père ou la mère a manqué gravement à ses obligations à son égard (violences, abandon de famille…) peut être dispensé, totalement ou partiellement, de l’obligation alimentaire par le juge aux affaires familiales », explique le site du service public.

Un enfant dont le père ou la mère « a été condamné pour un crime commis sur l’enfant ou l’un de ses ascendants, descendants, frères ou sœurs » peut également en être exempté.

La loi du 8 avril 2024 sur le « bien vieillir » a enfin élargi la dispense aux mineurs placés à l’Aide sociale à l’enfance (ASE) pendant au moins trois ans et à ceux dont l’un des parents a été condamné pour un crime ou une agression sexuelle sur l’autre parent.

Toutefois, pour d’anciens enfants maltraités, les textes restent trop restrictifs. D’autant que les victimes sont souvent amenées à prouver les faits devant la justice plusieurs dizaines d’années après, au moment où l’obligation alimentaire se rappelle à eux. C’est par exemple le cas de Jade, qui témoignait sur RTL avoir reçu un courrier des pompes funèbres lui demandant de régler les obsèques du père qui l’avait abandonnée.

Mettre fin à une « double peine »

Le collectif Les liens en sang plaide pour que tous les enfants de parents défaillants puissent être exemptés de l’obligation alimentaire. « C’est une question de moralité. Les enfants qui payent pour leurs parents c’est normal. Mais quand on a eu un parent défaillant, c’est une double peine », explique à BFMTV sa coprésidente Marine Gatineau-Dupré, par ailleurs à la tête de l’association Porte mon nom à l’origine de la simplification de la procédure de changement de nom de famille.

Le collectif propose ainsi que l’enfant puisse, entre ses 18 et 30 ans, se désolidariser officiellement d’un parent maltraitant devant un notaire. Ce faisant, il renoncerait aussi à sa part d’héritage.

Une proposition de loi en ce sens doit être déposée en avril par le sénateur Renaissance Xavier Iacovelli. « Il faut donner la possiblié à la victime de pouvoir rompre définitivement ce lien avec son bourreau », a-t-il affirmé sur Sud Radio ce mercredi 29 janvier.

« En gros, on part du principe que, lorsque l’on est adulte, on n’est plus une victime. Or quand on a été maltraité dans son enfance, on en conserve les séquelles tout au long de la vie », a-t-il ajouté, dénonçant des situations « ubuesques ».

Source

No comment yet, add your voice below!


Add a Comment

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *